enluminure
"...Dans cette ténébreuse
absence de mode, toute multiplicité disparaît et
l'esprit perd son être propre, il disparaît selon
sa propre activité. Et tel est le but suprême, le
"où" infini où aboutit la spiritualité
de tous les esprits ; s'être perdu ici pour toujours est
la suprême béatitude". |
Heinrich Seuse naît
au bord du lac de Constance, dans une famille de drapiers. Après
cinq années de noviciat chez les Dominicains, inspiré
par l'exemple des Pères du Désert, il se livre
à de redoutables austérités. En 1320 il
écoute les sermons de Maîtres Eckhart dont la doctrine
l'éblouit. Bientôt, au terme d'une crise spirituelle
intense, il commence une quête mystique plus intériorisée.
Suso, comme Eckhart et Tauler, est chargé par son Ordre
de visiter les couvents de moniales où il enseigne et
guide les consciences dont il a la charge sur la voie de la sagesse
éternelle. Mais la vénération dont il devient
l'objet de la part de ses "filles spirituelles" engendre
une campagne calomnieuse. Alertés, ses supérieurs
l'expédient à Ulm où il meurt en 1366. Il
sera béatifié en 1831. Suso adoucit la rigueur
eckhartienne en se référant souvent à l'humanité
du Christ. Sa langue plus tempérée évoque
la douleur de l'absence et, inspirée par la vision tragique
de la crucifixion, décrit le monde comme une ville en
ruines où errent les âmes en quête de Dieu.
Seule l'âme dénudée, détachée
des contingences sensuelles et mentales, peut remonter à
sa source, participer de l'effusion de la Déité,
"tranquille obscurité demeurant en elle-même". |